Une fin d’année mouvementée, le pouvoir face au front social
Pour la plupart des citoyens, l’année 2014 s’annonce sous de mauvais auspices. Le pouvoir aura du mal à satisfaire les besoins pressants de la population et personne ne saura convaincre le simple citoyen que l’année 2014 sera meilleure sur le plan social.
Une agitation inhabituelle règne depuis ces derniers jours, et les émeutes sont signalées presque au quotidien dans de différentes régions du pays : crise de logement, pouvoir d’achat , la santé, sont les principales revendications qui poussent les gens à manifester dans la rue et contraindre les jeunes à l’exil. Avec le retour des émeutes, à trois mois de l’élection présidentielle, le pouvoir se trouve dans une impasse, ce qui peut remettre sérieusement en cause un quatrième mandat de l’actuel locataire d’El Mouradia. La tension sociale a été particulièrement agitée au niveau de la capitale, à quelques jours de la fin d’année 2013, la population est au bord de l’explosion selon certains observateurs, et ce n’est pas les propos rassurants de Abdelmalek Sellal, lors de ses déplacements à travers le pays qui peuvent atténuer cette colère et le mécontentement grandissant des citoyens qui souffrent du chômage, notamment des jeunes diplômés, la crise de logement, l’accès aux soins dans les régions reculées, la justice sociale. Depuis la désignation d’Abdelmalek Sellal au poste de Premier ministre, le gouvernement a tenté en vain de concrétiser sur le terrain ses engagements. Cet échec a provoqué des mouvements de grève et de protestations au niveau de tous les secteurs. Mais, c’est encore le secteur de l’éducation qui se trouve à la pointe de ce combat. Le mois de janvier s’annonce chaud, au niveau de l’Education nationale, les différents syndicats et autres représentants des travailleurs de ce secteur ont averti les pouvoirs publics, dès le mois de décembre. Les derniers pourparlers avec le ministre de l’Education nationale n’ont pas abouti. Abdellatif Baba Ahmed n’a pas réussi à convaincre les partenaires sociaux du secteur. les représentants des travailleurs (CNAPEST et UNPEF) annoncent la couleur et l’on s’achemine vers un vaste mouvement de grève, pour dit-on «maintenir la pression» sur le département de Baba Ahmed. Les élèves ont repris, certes, le chemin de l’école, mais tout peut arriver avant la fin du mois de janvier, un nouveau débrayage des enseignants n’est pas à écarter. Certaines informations font état même d’une année blanche. Ce secteur vit cette crise depuis une décennie et rien ne semble se profiler à l’horizon pour une solution durable.
Le secteur de la santé est logé à la même enseigne, les grèves du personnel médical sont courantes, les professionnels de la santé sont déterminés à faire valoir leurs revendications. Ils ont exprimé clairement leur colère et ce, après une année d’ accalmie. Les promesses non tenues du gouvernement ont provoqué une grande déception : la prime de contagion n’est toujours pas attribuée et ce, malgré l’annonce faite par le Premier ministre lui-même.les syndicats autonomes dénoncent les conditions de travail et le manque de moyens pour la prise en charge des patients. C’est le cas de ce médecin urgentiste qui exerce dans un hôpital d’une grande ville : il qualifie les urgences de «mouroir public». Cependant, les zones isolées du monde rural vivent un véritable calvaire : des centres de santé sont fermés, faute de médecins et parfois, même pas la présence d’un infirmier pour les premiers soins ou une simple injection.
La crise du logement va en s’amplifiant, la réalisation de logements sociaux accuse des retards inexplicables dans les délais de réalisation. Le ministre de l’Habitat et de l’urbanisme a programmé le lancement de 230.000 unités dans le cadre de la formule location-vente, ce qui est très en deçà de la forte demande de nombreux souscripteurs au niveau des grandes villes, telles qu’Alger, Oran Constantine et Annaba. À défaut d’un véritable programme de logements sociaux pour les couches les plus démunies à l’horizon 2014-2015, l’Algérie accusera un grand déficit en matière de logement dans les pays du MENA. La crise de logement dans le monde rural a été quelque peu atténuée ces dernières années par la construction de logements ruraux mais là encore, les conditions de vie sont difficiles.
La mission confiée par Bouteflika à Abdelmalek Sellal s’apparente à un véritable échec et pour cause, les prix des produits de première nécessité flambent et l’inflation met à rude épreuve le pouvoir d’achat. Ces augmentations surprises en ce début 2014 ont de quoi inquiéter les ménages.Malgré les subventions accordées au secteur agricole, notamment dans la filière des produits laitiers, les augmentations (de 20%) seront supportées par les consommateurs. On a beaucoup disserté sur la sécurité alimentaire pendant ces dernières années. Faut-il encore assurer aux fellahs les moyens de cette politique. A trop vouloir miser sur la rente pétrolière, la dépendance alimentaire sera une réelle menace.
ALGER – Abdou Merouane