Voici ce que dit le rapport sur le carburant
En cette période marquée par la campagne de boycott de certains produits de consommation, dont les carburants, lancée sur internet, le rapport de la commission des Finances de la Chambre des représentants était très attendu. Sa présentation prévue le mardi 15 mai 2018 au Parlement devrait susciter de vifs débats. En effet, ce rapport de 81 pages, dont nous détenons une copie, analyse d’abord le secteur avant et après libéralisation de la filière, dresse des conclusions avant d’émettre des recommandations. C’est ainsi qu’on y apprend que le premier bénéficiaire de la libéralisation du secteur est l’État qui a économisé 35 milliards de DH annuellement. Cette somme correspond au coût supporté auparavant par la caisse de compensation.
Aussi, la commission relève qu’indépendamment du taux des taxes, les prix appliqués au Maroc après la libéralistion restent parmi les plus bas par rapport à ceux pratiqués dans les pays non producteurs de pétrole. Le rapport souligne que les prix des carburants dans tous les pays non producteurs de pétrole et où les subventions de l’Etat sont inexistantes, ne sont pas moins chers qu’au Maroc, citant à titre d’exemple la France, où le prix d’un litre varie entre 14 et 21 DH, et le Sénégal où le prix atteint 11 DH. Il note également l’absence de procédures accompagnant la libéralisation du marché des hydrocarbures, en premier lieu l’absence de système permettant de suivre avec précision l’évolution des prix au niveau international et son impact sur le niveau national permettant d’intervenir si nécessaire comme c’est le cas pour les denrées alimentaires de base.
La commission présidée par Abdellah Bouanou, parlementaire du PJD, ajoute avoir enregistré un changement des prix de vente au public le premier et le seizième de chaque mois au début de la libéralisation, tous les dix jours par certaines entreprises et récemment chaque semaine par un certain nombre de sociétés. Aussi, elle a constaté la croissance de la création de stations de service à des taux élevés par rapport à la phase de pré-libéralisation. Enfin, la commission souligne qu’il n’y a pas eu de changement au niveau des marges bénéficiaires pour les propriétaires et gestionnaires de stations-service.
Ainsi, pas moins de 19 recommandations ont été émises par la commission d’enquête. Elle encourage par exemple les professionnels du secteur à poursuivre et à intensifier leurs investissements afin de diversifier l’offre et améliorer la disponibilité des stocks, tout en sommant le gouvernement à encourager cette activité. La commission demande également la révision des conditions de financement du secteur bancaire aux entreprises qui est susceptible ainsi à réduire la pression sur leurs financements, ce qui pourrait induire à une réduction indirecte des prix. Elle estime que le gouvernement devrait intensifier ses efforts pour surveiller de près le secteur des hydrocarbures et combattre toutes les pratiques suspectes. L’exécutif doit également poursuivre ses efforts pour favoriser l’accès aux énergies alternatives et renouvelables, notamment dans les zones les plus consommatrices d’énergies traditionnelles. Aussi, la création d’un mécanisme gouvernemental pour le suivi et la surveillance des prix aux niveaux international et national, ainsi que la publication et la prise de mesures appropriées et nécessaires pour protéger les consommateurs. La commission souligne également la nécessité pour le Conseil de la Concurrence d’analyser et de contrôler la concurrence sur le marché des hydrocarbures et de surveiller les pratiques illicites telles que la concentration et le monopole.
Enfin, la commission recommande aux entreprises la création de filiales spécialisées dans le stockage des matières pétrolières pour ne pas interférer dans les activités de la distribution, ainsi que le changement radical de la carte de la distribution du carburant pour suivre la libéralisation du secteur.