Assurance dégâts des eaux : faire face à l’hiver
Ces trois dernières années, l’assurance du risque habitation, a attiré de plus en plus l’attention non seulement dans les milieux des particuliers, les milieux professionnels mais aussi chez les assureurs. L’enjeu représenté par la masse des contrats multirisques habitation et par sa progression constante depuis quelques années, n’est certainement pas étrangère à l’intérêt que lui ont témoigné ces dernières années les différents acteurs participant à l’acte d’assurance (assurés, puissance publique, assureurs). C’est ainsi que la dernière décennie du XXème et le début du XXIème siècle auront été salutaires pour le consommateur marocain qui, grâce à des textes législatifs majeurs ont vu ses protections renforcées (code des assurances, loi sur la concurrence et les prix). C’est dans ce contexte particulier qu’ont évolué la plupart des contrats multirisques habitation du marché qui sont entrés dans leur troisième génération. En effet, nous sommes passés du contrat à garantie unique, type incendie, à des contrats à double garantie avec en principal, l’incendie et en annexe les dégâts des eaux pour aboutir à de véritables contrats multirisques habitation associant plusieurs garanties, ce qui met le consommateur dans une situation privilégiée, car il peut lui-même concocter son contrat et l’adapter à sa juste dimension, collant réellement à ses véritables besoins.
Ce besoin de sécurité est si naturel et si évident alors que le législateur marocain n’ pas jusqu’à présent jugé utile de rendre cette assurance obligatoire pour les propriétaires ou locataires d’un bien immobilier, bien que la plupart des banques l’exigent en cas de prêt hypothécaire immobilier. Le fait d’acquérir un bien immobilier est intimement lié à l’angoisse ou la hantise de le perdre. L’investissement consenti est si important que la prime d’assurance paraît dérisoire. A noter, par ailleurs, que dans le contrat programme 2011-2015 du secteur des assurances avec le gouvernement, les opérateurs exigent à rendre certaines assurances obligatoires et parmi lesquelles figure la multirisque habitation. La garantie dégâts des eaux représente le troisième poste de ce type de contrats.
Pourquoi une assurance dégât des eaux ?
Les aléas climatiques épargnent rarement les habitations et riment trop souvent avec l’éclatement des canalisations et dégâts des eaux. Avec cette période de froid et d’intempéries parfois extrêmes, les habitations souffrent jusque dans leurs entrailles de deux sortes de sinistres qui sont principalement déclarés à cause des intempéries : un éclatement de canalisation et un dégât des eaux provoqué par cette rupture de canalisations.
Pour la troisième année consécutive, le Maroc est frappé par des pluies diluviennes. En effet, les années 2010, 2011 et 2012 ont montré l’importance des désastres provoqués par les inondations pluviales, urbaines ayant touché les grandes villes du royaume. Par exemple, des précipitations exceptionnelles avec plus de 200mm, soit l’équivalant de six mois de pluie en 12 heures ayant paralysé une partie du territoire du grand Casablanca et ont inondé plusieurs habitations même dans les quartiers résidentiels. Les autres villes ont subi le même sort.
Pour chacun des risques majeurs, vécus par la population, il s’agit de comprendre comment il faut se préparer et s’adapter aux risques dégâts des eaux. La forte densité des populations, des habitations et les énormes concentrations de valeurs économiques peuvent causer des dommages mettant en jeu le patrimoine même de la population.
Quels sont les dommages couverts par cette garantie ?
Sont garantis les dommages matériels causés par l’eau aux biens assurés provenant :
– Des ruptures (y compris par suite de gel) fuites accidentelles ou débordements de conduites non enterrées, chéneaux, gouttières, d’appareils de chauffage et plus généralement de tout appareil ayant une arrivée et une évacuation d’eau ;
– D’infiltrations accidentelles se produisant au travers des toitures, ciels vitrés, terrasses, balcons, plafonds, gaine d’aération de ventilation et de fumée ;
– Murs extérieurs ;
– D’infiltration par les joints d’étanchéité aux pourtours des installations sanitaires et au travers des carrelages. Cette cause est l’objet d’un certain nombre de conflits pour les dommages causés aux tiers et reste indéfinie pour les dommages que l’auteur du sinistre se cause à lui-même. Beaucoup de contrats du marché continuent à exclure cette cause ;
– De débordements, ruptures et renversements de récipients ;
– D’infiltrations ou de ruissellement des eaux de pluies par des ouvertures telles que portes et fenêtres ;
– D’engorgements ou de refoulement d’égouts.
La garantie dégâts des eaux prévoit également l’indemnisation des frais suivants :
– Frais résultant de travaux nécessités par la recherche de fuites qui sont à l’origine d’un risque garanti ainsi que les frais de remise en l’état après travaux de recherches ;
– A la suite de la détérioration due au gel, les frais de réparation :
– des conduites et appareils à effet d’eau situés à l’intérieur de bâtiments normalement chauffés ;
– des radiateurs et chaudières.
Certaines compagnies d’assurances accordent des extensions de garanties même pour les « événements climatiques», piscine en dur enterrée, court de tennis, bain maure, etc.
Cette liste n’est pas exhaustive. Nous vous conseillons de vous reporter à votre contrat d’assurance habitation afin de voir ce que couvre votre assureur en cas de dégâts des eaux. La prise en charge des sinistres varie selon les assureurs et essayez d’exiger le maximum d’éclairages sur le contenu des garanties qui ne vous paraissent pas bien explicitées dans votre contrat. C’est le cas de certains produits commercialisés par certaines compagnies d’assurances couvrant, dans cette garantie le risque «éléments naturels» où il est difficile de comprendre de quoi il s’agit exactement. Ce genre de flou est malheureusement à l’origine de plusieurs difficultés rencontrées par les assurés, à l’occasion de la demande d’indemnisation en cas de réalisation du sinistre.
Quelles sont les prestations remboursées en cas de sinistre ?
En qualité de locataire ou d’occupant à l’égard du propriétaire des biens ;
– pour les dommages matériels affectant les bâtiments loués ou occupés (risques locatifs),
– pour les dommages immatériels consécutifs à des dommages matériels garantis c’est-à-dire :
– le trouble de jouissance causé à un ou plusieurs colocataires,
– la perte des loyers subie par le propriétaire,
– la perte d’usage des locaux occupés par le propriétaire.
2. En qualité de propriétaire occupant partiel à l’égard des locataires habitant dans le bâtiment assuré :
– pour les dommages matériels affectant les biens des locataires en raison d’un vice de construction ou d’un défaut d’entretien de l’immeuble,
– pour les dommages immatériels consécutifs à des dommages matériels garantis (trouble de jouissance, frais de déplacement et de relogement).
3. Vis-à-vis des voisins et des tiers (recours des voisins et des tiers) :
– pour les dommages matériels et immatériels consécutifs (tels que perte de loyers, perte d’usage des locaux et/ou frais de déplacement, de relogement et de déblais) résultant d’un événement garanti survenu dans les biens assurés ou les bâtiments loués ou occupés par vous.
Attention aux exclusions car cette garantie ne couvre pas tout
C’est là une rubrique qui échappe à l’attention de nombreux assurés et de ce fait, la source principale de plusieurs litiges avec les assureurs dont on se rend compte que le jour de la demande d’indemnisation en cas de réalisation du dommage causé par un dégât des eaux. Généralement, les événements suivants ne sont pas garantis et ne rentrent pas, par conséquent, dans la tarification de votre contrat d’assurance habitation :
– les réparations de toiture, ciels vitrés, terrasses, balcons et balcons-terrasses ;
– les dommages résultant d’un défaut d’entretien permanent ;
– les dégâts dus à des fuites ou des ruptures de canalisation enterrées (celles dont l’accès nécessite des travaux de terrassement ou de fouille) ;
– les frais d’engorgement, de réparation, de remplacement des conduites, robinets et appareils ;
– Les infiltrations d’eau à travers les murs extérieurs résultant de leur porosité (certaines compagnies accordent cette garantie uniquement pour le premier sinistre) ;
– Les dommages subis par le matériel, le mobilier et les marchandises se trouvant en plein air ;
– Les dégâts dus à l’humidité ou à la condensation lorsqu’ils ne sont pas la conséquence directe d’un sinistre garantie ;
– Les dommages occasionnés par les eaux de piscine (sauf convention contraire) ;
– Les dégâts des eaux occasionnés par les inondations, marées, débordements de sources, cours d’eau, étendues d’eau naturelle ou artificielle ;
– Les dommages dus à la remontée des nappes phréatiques.
– Les dommages aux espèces, titres et valeurs.
Les pièges à éviter et les précautions à prendre
Avec la profilifération des réseaux de distribution des produits d’assurances (particulièrement les banques qui sont champions dans la vente des contrats d’assurances habitation), l’on a largement le choix dans la recherche de tarifs mois chers. A ce titre, les championnes de communication des sociétés d’assurances et des banques foisonnent de publicités alléchantes telles que : assurances habitation accessibles à tous à partir de 1 DH/jour ; 16 à 30 DH/ mois, etc . La confusion est encore plus entretenue dans l’esprit d’assurés potentiels par des formules inscrites sur ces pages publicitaires avisant ces derniers que « ces informations sont fournies à titre indicatif et n’ont aucune valeur contractuelle », auquel cas quelle serait leur utilité ?
C’est la raison pour laquelle la vigilance doit être de mise avant le choix de votre contrat d’assurance habitation. Il faut savoir que la tarification est fonction des garanties demandées, de la valeur des capitaux assurés, du montant de la franchise (= part de l’indemnité restant en tout état de cause à la charge de l’assuré et déduite du montant de l’indemnité due).
S’agissant de l’indemnisation, l’objectif étant de remettre l’assuré dans la situation dans laquelle il se serait trouvé si le sinistre n’avait pas lieu ; autrement dit, indemniser sans enrichir ni appauvrir. Les sommes assurées ne peuvent être considérées comme une preuve de l’existence et de la valeur de vos biens au moment du sinistre. L’assuré est tenu d’en justifier par tous les moyens et documents en son pouvoir et de justifier également, à l’occasion de l’expertise, l’importance des dommages subis. L’assuré qui, de mauvaise foi, exagère le montant des dommages, prétend détruits des objets ou des biens n’existant pas lors du sinistre, dissimule ou soustrait tout ou partie des objets assurés, emploie comme justification des moyens frauduleux ou des documents inexacts, doit savoir qu’il sera déchu de tout droit à indemnité.
Enfin, il est important de vérifier, dans son contrat, le délai prévu pour la déclaration du sinistre. Il faut, toutefois, avoir à l’esprit que l’assureur ne peut invoquer la déchéance pour déclaration tardive, que s’il est en mesure de prouver que ce retard lui a causé un préjudice.
Abdelfettah ALAMI