Blog de Jamal Berraoui

De l’enfance (Par Jamal Berraoui)

L

e Conseil national des droits de l’homme s’est penché sur les centres d’accueil des enfants. Ce rapport n’est pas à l’honneur du Maroc. Il n’y a que dix sept centres, et trois sont fermés pour des travaux. Ils sont mal répartis géographiquement et présentent des caractéristiques très différentes. Cependant, tous ont le même dysfonctionnement. Les enfants abandonnés ou en situation difficile sont en contact avec d’autres qui ont eux, des problèmes judiciaires pour des délits plus au moins graves. Des enfants en très bas âge sont mélangés avec d’autres, de plusieurs années leurs aînés, ce qui pose le problème de leur protection. Le rapport note que ces enfants subissent des brimades, des coups et souffrent de malnutrition, ce qui les pousse à fuir et à préférer la rue. Selon ses calculs, le budget alloué ne dépasse pas les 20,00 DH par jour.

Ce rapport est une condamnation d’une réalité. Le Maroc est signataire de conventions internationales de protection de l’enfance, la nouvelle Constitution lui accorde toute la place qu’elle mérite. Le discours politique sur la question est très fort. Mais la réalité que décrit le CNDH est celle d’un échec absolu. Les enfants sont privés de leurs droits les plus élémentaires, ne bénéficient pas d’un réel suivi médical, par exemple. On est loin des standards internationaux, à des années lumière. Il faut remédier à cela par une réforme de l’organisation de ces centres, sans doute avec plus de moyens. L’objectif n’est pas de « parquer » ces enfants, de les éloigner de la cellule familiale, mais de les éduquer correctement et de préparer leur réinsertion, si possible au sein de leur propre famille.

Cette enfance, y compris quand elle a entamé un parcours de délinquant doit pouvoir compter sur l’aide de personnel spécialisé, non pas dans le « gardiennage » mais dans l’éducation. Il faudrait peut-être recenser les anciens de ces centres et regarder de plus près leur sort à la majorité. Vu ce que décrit le rapport, il est probable, qu’en dehors d’une petite minorité, ils sont restés dans la marginalité, quand ils n’ont pas sombré dans la délinquance. 

Quand on parle de moyens à donner, il faut mettre en face le coût de cet échec. Non seulement le coût humain de ces vies à qui on n’offre aucune chance, mais le coût matériel lui-même. La délinquance a un coût (police, justice, prisons), la drogue, les maladies mentales aussi. 

Mais le problème n’est pas simple. Le tissu associatif a maintenant une expérience pertinente, près de vingt ans dans le domaine, qui lui permet de tirer des conclusions. La resocialisation de ces enfants est un processus long et complexe. Il faut un suivi personnalisé parce qu’au-delà des apparences, chaque cas est unique. Les réussites ne sont pas nécessairement durables. Des enfants réintégrés dans leur famille rechutent, parce que les conditions qui les ont fait fuir n’ont pas changé.

Cela ne peut être utilisé comme argument pour déresponsabiliser l’Etat, voire la société dans son ensemble. Les enfants en difficulté, y compris les primo-délinquants ont droit à un soutien, une protection. Aucune société n’est viable si elle abandonne les plus faibles. Y a-t-il plus faible qu’un enfant abandonné ?

Il faut féliciter le Conseil National des droits de l’homme pour la qualité de son travail, la sincérité de ses rapports et son attachement viscéral à la conception universelle des droits de l’homme. Le chemin est long, mais ce n’est qu’en nous imposant les standards internationaux que nous réussirons à bâtir ce Maroc d

 
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