Santé

Dr Bouchra Benchekroun : « Je milite pour une médecine préventive, prédictive et personnalisée »

Premier ouvrage du Docteur Bouchra Benchekroun, Médecin, Nutritionniste, Psychothérapeute exerçant à Casablanca, « Au cœur de la guérison », nous invite à l’exploration de nouvelles voies thérapeutiques et donne les clés pour accéder au pouvoir de la pleine santé. 

Challenge : Quelle était votre intention en écrivant ce livre ?

Dr Bouchra Benchekroun : A travers ce livre, j’ai voulu partager le fruit de plus de 25 années d’expérience et de recherche, d’abord en tant que nutritionniste, puis en tant que médecin-chercheur. Il faut savoir que la science a beaucoup avancé, et certaines connaissances sont à présent révolues puisqu’aujourd’hui, on arrive à détecter au détail certains nutriments qui sont dans le corps. Il est établi qu’à la source de toute maladie, il y a soit une carence nutritionnelle, soit un corps plein de toxines. Et ces 2 bases de la maladie sont déclenchées par les chocs émotionnels et le stress. Hélas, cela s’aggrave parce que nous ne savons pas gérer le stress, qui est pourtant normal et doit faire partie de notre vie. Ce qui en revanche ne devrait pas en faire partie, c’est cette chronicité, cette incapacité ou cette ignorance à réagir quand on est face au stress.

Dans ce livre, je fais allusion à ces connaissances, et j’invite à une prise de conscience de qui nous sommes et de notre extraordinaire capacité à l’auto-réparation ; encore faut-il avoir les bonnes bases pour permettre le rétablissement (des aliments et nutriments de qualité, une vie saine, et une bonne gestion émotionnelle).

Le système médical traditionnel nous a mis dans une forme de dépendance et de discrimination ; c’est-à-dire que nous avons développé cette perception que la maladie nous tombe dessus sans aucune forme de responsabilité de notre part. Pourtant, il y a toujours une raison et un laisser-aller, un ensemble de causes qui produisent de tels effets. Dans ce livre, je veux donner une autre vision, un autre paradigme de la santé et une autre façon de l’appréhender (il y aura probablement un 2nd livre avec des clés plus pratiques). C’est la proposition d’une médecine préventive, qui traite les symptômes avant que ne s’installe la maladie, au moment où le dysfonctionnement est encore au stade fonctionnel, et avant qu’il ne devienne lésionnel. Il est à la portée de chacun de l’appréhender en prenant les bonnes résolutions.

Challenge : Quel est le relationnel que vous créez avec vos patients sur la base de cette réflexion ?

Dr Bouchra Benchekroun : Une bonne partie des patients que je reçois ont lu mon livre. Ils ont adhéré à l’approche et ont même trouvé réponse à tous leurs questionnements et leur souffrance intérieure par rapport à un état qui ne s’améliore pas, une fatigue chronique, ou une maladie qui se perpétue dans le temps. Ils ont surtout compris qu’ils ont aussi une partition à jouer dans la voie de la guérison; et je suis à la fois leur coach et le catalyseur de cette santé intérieure.

Challenge : Vos réflexions sont-elles partagées par l’ensemble du corps médical ?

Dr Bouchra Benchekroun : Bien sûr. La médecine fonctionnelle est en vogue depuis une vingtaine d’années, d’abord aux Etats-Unis, puis dans beaucoup de pays européens. C’est une médecine qui s’attache à prévenir et s’appuie sur les investigations purement allopathiques et conventionnelles dans les analyses. Cela consiste à procéder à des checkups puis, selon les symptômes, déterminer le fonctionnement qui est inapproprié. Les connaissances d’aujourd’hui ont mis en exergue l’importance des systèmes endocrinien et immunitaire, et du microbiote considéré comme le 2ème cerveau.

D’ailleurs, sur ce dernier point, notre flore intestinale est très importante car c’est là où se passent beaucoup de réactions, absorptions et assimilations de nutriments ; et très souvent nous avons déséquilibré notre microbiote. J’aime à dire que nous avons autant déséquilibré notre flore intestinale que notre flore végétale. Par manque de biodiversité, comme pour la nature, l’homme a affaibli son microbiote en mangeant de manière déséquilibrée et complètement ultra-transformée. Il en découle un manque d’assimilation induisant des carences nutritionnelles.

Challenge : Comment communiquez-vous vos idées ? 

Dr Bouchra Benchekroun : Je ne fais pas beaucoup de choses en ce sens par manque de temps ; de plus je suis toujours dans mes recherches. Par ailleurs, ma passion, la médecine fonctionnelle me prend beaucoup de temps à travers mes consultations. Néanmoins, chaque fois que l’occasion se présente, avec mes patients notamment, j’échange sur le sujet assez naturellement. D’ailleurs, ce livre devrait avoir une portée de formation et non pas d’information. On devrait former les patients comme les médecins également sur cette vision. Les médecins sont aussi des proies à cette dogmatisation médicale, dans le sens où tout notre cursus académique nous forme à proposer une thérapeutique. Celle-ci est systématiquement présentée par ceux qui fabriquent ; donc nous sommes complétement alliés ou sous la dépendance de ceux qui font la promotion du pharmaceutique. Il y a néanmoins, d’autres voies.

Pour vous donner un exemple, dans le cas d’une arthrose, on calme la douleur avec un anti-inflammatoire. Pourtant on sait aujourd’hui qu’en cas d’inflammation, il y a des molécules dans le corps qui sont pro-inflammatoires et qu’il faudrait les réduire en faveur d’autres qui diminuent l’inflammation. Et tout cela peut se faire à un niveau micro-nutritionnel avec des oligo-éléments, des vitamines, etc. Les anti-inflammatoires, on les retrouve dans les acides gras. Si on prend des omégas 3, du poisson par exemple, on a moins d’inflammation dans le corps. Automatiquement, nous avons moins d’arthrite. Donc, la pharmacologie aussi est à revoir complètement. 

Challenge : Cela veut-il dire que l’alimentation joue un rôle plus étendu qu’on ne le pense ?

Dr Bouchra Benchekroun : Oui, certainement. Il est prouvé aujourd’hui qu’un intestin perméable déséquilibre le microbiote, et laisse passer des toxines qui sont des bactéries inflammatoires. Donc si on rétablit l’intestin, il y a des arthralgies qui disparaissent. Il y a donc bien un lien au niveau de la dysbiose intestinale. Nous devons donc mieux choisir notre alimentation. Une alimentation en sucres ou aliments raffinés, est une alimentation inflammatoire. Et la majorité des maladies sont dues soit à l’oxydation, à l’inflammation ou à la glycation; ce sont les 3 modes de vieillissement ou de fonctionnement défectueux dans le corps qui font que la maladie se déclenche. L’artériosclérose par exemple, n’est qu’une inflammation au niveau des artères. Ainsi, on peut dire qu’à l’origine de toute maladie il y a une inflammation. Et la nutrition peut venir à bout de l’inflammation, en dehors des anti-inflammatoires qui sont vendus dans le commerce et qui comportent une liste d’effets secondaires.

Challenge : Quel est le message que vous souhaitez délivrer ?

Dr Bouchra Benchekroun : Notre corps a la capacité de s’autoréparer, s’auto-régénérer, encore faut-il lui en donner les moyens. Aujourd’hui, notre mode de vie est complètement à l’encontre, et bloque tous nos moyens d’auto-guérison. Pourtant, le simple fait de jeûner durant le mois de Ramadan permet au corps de mettre en place tous ces systèmes d’auto-réparation. Cette diète alimentaire permet au corps de se nettoyer et de créer des cellules souches, qui ne sont pas encore différenciées, et qui sont capables de pallier le manque de tout type de cellule dans le corps (musculaire, nerveuse, cardiaque, etc.). Et il y a un cycle naturel de renouvellement qui permet aux cellules souches de donner priorité aux organes qui ont été le plus affectés.

Dans ce livre, vous trouverez les grandes lignes d’une directive qui peut servir à toute personne soucieuse de sa santé et qui veut comprendre ce qu’est la maladie, comment elle arrive, ce qu’on peut faire… C’est vrai que les gens ont réclamé des outils plus précis, parce qu’en général l’homme est fainéant et n’a pas forcément envie de fournir un effort. Je préfère procéder ainsi, d’abord parce que moi-même j’apprends toujours ; et ensuite parce que j’estime que ce livre n’a pas encore pris toute sa place dans la société ; c’est-à-dire celle de la prise de conscience. C’est un ensemble de connaissances qui ont déjà été présentées par d’autres collègues dans le temps, éminents médecins, auxquels j’ai fait allusion dans ce livre, que ce soit en neuroscience, en médecine, etc. Hélas, du fait de la mondialisation de l’économie, la présentation de ces connaissances a été faite jusqu’à présent sous un angle pécuniaire, plus que dans l’intérêt de l’humain.

 
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