Immobilier

La Covid-19 va-t-elle corriger les prix de l’immobilier au Maroc ?

Longtemps déconnectés de la réalité, avec des produits non adaptés aux besoins, les prix de l’immobilier font face aujourd’hui au gros dilemme du Covid-19. En fond de toile, une question lancinante : la crise va-t-elle (définitivement) pousser ces prix à la baisse ?

Rien n’est moins sûr. Attribuer une baisse des prix à la crise du coronavirus, c’est avancer trop vite en besogne. Pour William Simoncelli, Directeur Général de Carré Immobilier, « il n’existe pas pour l’instant de données sur la baisse des prix pour la simple raison qu’il n’y a pas de transactions. Je pense que la crise aura un effet sur la baisse des prix, mais il est encore trop tôt pour se prononcer. Sans pour autant être catégorique, on peut dire qu’il y a un risque que la demande solvable va s’affaiblir dans le temps ». En réalité, il n’y a pas de pression à la vente car une grosse partie du marché est déjà propriétaire : ceux qui veulent vendre (en temps normal) sont ceux qui possèdent des biens. Les primo-accédants ne sont pas majoritaires sur le marché. Il faudra donc laisser du temps et de la distance au marché pour lire clairement les tendances. Et pour être attractifs, les vendeurs seront amenés à baisser les prix. « Et cela va prendre 4 à 6 mois pour se manifester », avance Simoncelli.

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Pourtant le constat est unanime : l’immobilier au Maroc souffre de nombreux maux qui l’ont rendu souffrant. Prix décorrélés, inadéquation de l’offre à la demande qui a entraîné mévente, surstock : les ventes stagnent et ont du mal à retrouver les performances d’il y a une décennie. Et la crise du coronavirus, qui a mis nombre d’employés au chômage et poussé les consommateurs à être plus sélectifs dans leurs achats, n’arrange pas les choses. Mais selon l’agent immobilier, il faut d’abord lever une confusion. « La valeur est le montant qu’attend un vendeur de la cession de son bien. Le prix est le montant constaté devant notaire après accord entre les parties. C’est donc la valeur qui est décorrélée du besoin. Les vendeurs demandent plus que le client est prêt à payer ». Distinction faite, celui-ci évoque l’impact brutal qu’a eu la crise sur les activités. « La crise sanitaire a eu pour effet de marquer un coup d’arrêt dans l’activité : plus aucune visite dès l’annonce du confinement », avance-t-il. Ce qui a eu pour effet un décalage des demandes, et des ambitions d’achat reportées sine die.

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Mais depuis le déconfinement, précise-t-il, il y a un effet « rattrapage », avec beaucoup de visites organisées. « Nous enregistrons beaucoup de demandes dans l’immobilier d’entreprise et dans le résidentiel. Cette part d’activité est depuis début juin revenue à la normale. Seul bémol, malgré ce retour des visites et des consultations, les réalisations (conclusions de ventes, de deals) ne décollent pas. Les prises de décision sont plus longues du fait du manque de visibilité ». En clair, la volonté affirmée d’acheter est systématiquement remise à plus tard, en attendant de voir l’évolution de la situation générale.

3 questions à William Simoncelli, Directeur Général de Carré Immobilier

Quel pronostic faites-vous sur le secteur et les prix immobiliers à court et moyen terme ?
W. S.
 : Nous misons, au meilleur des cas, sur une reprise probable dès début Octobre de cette année, avec la réouverture des entreprises et les problématiques d’aménagement de l’espace que posent les nouvelles règles de sécurité sanitaire. Ceci dit, le manque de visibilité pour le secteur pousse certains à pronostiquer une reprise qu’à partir du deuxième trimestre 2021. Sur les prix, il est probable qu’on soit sur une tendance baissière, mais on observe cette tendance depuis au moins 2 à 3 ans. La crise sanitaire n’a fait qu’accentuer cette tendance, jouant un effet accélérateur dans la dégradation du gap entre la valeur et le prix.

Dans toute crise, on parle d’opportunités à saisir. Quelles peuvent être celles à saisir par l’immobilier au Maroc et comment ?
W. S. : Il faut noter, qu’a contrario de la croyance générale que l’immobilier est une valeur refuge, l’immobilier est plutôt un marché résilient ou une valeur résiliente. Et ses baisses, tout comme ses hausses, constituent généralement de vraies tendances. Il est donc trop tôt pour dégager une tendance par rapport à la crise du coronavirus. Quant aux opportunités à tirer de cette situation, je dirai que ceux qui disposent de liquidités disposent ainsi d’un vrai pouvoir de négociation. Les vendeurs, eux, vont devoir se mettre en conformité avec les besoins des clients pour pouvoir vendre.

Quelles sont les tendances de l’immobilier à l’international ? Observe-t-on la même atonie ou une reprise ?
W. S. : Sur le plan international, il n’y a pas non plus de mouvements ou changements particuliers dans le secteur. Les prix sont restés les mêmes et on ne constate pas encore une évolution à la baisse. Les prochains mois nous situeront davantage sur les tendances du secteur.

 
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