Les opérateurs ont du pain sur la planche pour convaincre le consommateur
Le secteur de la banque participative a pris ses marques au Maroc depuis quelques mois.
À date d’aujourd’hui, la majeure partie des 8 banques initialement annoncées (soit 5 filiales et 3 fenêtres) ont démarré leurs activités. La dernière en date reste BMCE Bank qui a officiellement lancé les activités de sa filiale participative, BTI Bank, le 26 décembre. Même d’autres opérateurs de la place tardent à se lancer dans cette nouvelle aventure, c’est le cas de BMCI ou encore de Crédit du Maroc, il n’en demeure pas moins que la course aux parts de marché a commencé. Une course effrénée qui va demander beaucoup d’efforts aux équipes managériales de ces nouvelles banques qui, pour la plupart sont issues du secteur des banques classiques. L’élément déterminant dans cette course sera sans doute le positionnement de chaque opérateur pour mieux percer dans le marché et séduire la clientèle. C’est ce que précise le cabinet Kantar TNS dans sa dernière enquête qui porte sur la perception des Marocains sur ces nouvelles banques et qui réserve une bonne partie au plan d’action que devraient suivre ces établissements pour se faire une place sur le marché. « On voit que ces nouvelles banques participatives n’arrivent pas déjà à se différencier. Elles se concentrent toutes sur la communication institutionnelle. D’où l’intérêt de notre étude dont l’objectif est de cerner le sujet du point de vue du client », explique celui qui a conduit cette étude, Si Mohammed Bellamine, Account directeur chez Kantar TNS. Le rapport souligne ainsi, que les moins de 35 ans représentent la population la moins bancarisée au Maroc comparativement aux seniors. « Cela représente une opportunité pour les banques participatives. D’abord, il faut savoir que les moins de 30 ans représentent plus de 55% de la population marocaine, ce qui en fait une cible privilégiée, un créneau de potentiels clients », explique Si Mohammed Bellamine, ajoutant que c’est aux départements Marketing des nouvelles banques de savoir comment adresser cette cible, avec quel type de message réussir à les accrocher…
Nouveaux produits
L’étude de Kantar TNS est un véritable guide pour les opérateurs de la banque participative dans la mesure où elle peut les aider à mieux définir plusieurs paramètres de leurs différents plans d’action. Les auteurs du rapport ont défini quatre segments de clientèle pour la banque participative. D’abord, il ya le premier segment qui est constitué des croyants représentant 25% de la population marocaine, et le quart des personnes intéressées par les produits participatifs. Et c’est d’ailleurs le cœur de cible de ces nouvelles banques. Il y a ensuite le segment de ceux qui privilégient l’intérêt économique, c’est-à-dire qu’ils n’iront pas à la banque pour des convictions religieuses et ceux qui sont perplexes ayant des convictions religieuses, mais à qui il faudra encore beaucoup plus d’informations pour les convaincre. Ceux-là représentent les 2/3 du marché. « C’est d’ailleurs pour cela que la religion ne doit pas être la clé d’entrée de ces nouveaux établissements », mettent en garde les auteurs de l’étude. Et le dernier segment est composé des réfractaires qui estiment que les banques participatives ne sont pas différentes des banques classiques et que tout le reste n’est que du maquillage. Cette population pèse 8% du marché. Depuis leur lancement, toute la communication des banques participatives est concentrée sur leur image institutionnelle, une erreur à en croire les auteurs du rapport, qui d’ailleurs invitent ces établissements à rediriger et centrer la communication sur le consommateur. « Il y a un travail de pédagogie et de sensibilisation à faire pour faire connaître les produits offerts à la nouvelle clientèle. Aujourd’hui les banques participatives qui ont démarré leurs activités communiquent sur la même chose, alors que dans un marché concurrentiel, il faut arriver à se différencier pour attirer l’attention du client. Chaque banque doit avoir un élément de différenciation qui constituera son positionnement sur le marché. Elles ne doivent pas s’attaquer à la même cible de la même manière. Dans la banque classique, Attijariwafa bank n’a pas le même positionnement que la BMCE Bank. De même, la BCP n’a pas non plus le même positionnement que CIH Bank par exemple. Ce sont de tels éléments qui feront la différence », soutient Si Mohammed Bellamine, qui fait remarquer que l’étude a d’ores et déjà attiré l’attention de deux établissements de la place qui se sont rapprochés pour travailler ensemble. Concernant les produits, les banques devraient également se bouger, c’est-à-dire proposer le plus possible de nouveaux produits sur le marché pour varier leurs offres. Même si pour le moment les banques participatives vont commercialiser les mêmes produits tels Mourabaha, Ijara, Moucharaka et autres, qui sont autorisés par le CSO (Conseil supérieur des oulémas) et Bank Al-Maghrib, il n’en demeure pas moins qu’elles ont la possibilité de proposer de nouveaux produits aux autorités qui examineront leur conformité par rapport à la Charia pour validation. Outre cela, il y a aussi le volet du digital qui va jouer un rôle très important. Mais, « le digital ne doit pas signifier un copier coller de ce que font déjà les banques classiques. Il faudra donc innover », précise Si Mohammed Bellamine. Pour rappel, ces nouvelles banques devraient permettre d’augmenter de 10% le taux de bancarisation au Maroc durant les trois prochaines années, selon Kantar TNS, qui ajoute aussi que 10% des clients des banques classiques devraient migrer vers les banques participatives.