Terrorisme : Pensées meurtrières
Le terroriste de la Nouvelle-Zélande a lu la théorie du remplacement. Les mots tuent et le vrai combat est celui de la pensée.
Cinquante fidèles ont été assassinés lors d’une prière, en Nouvelle-Zélande. Agés de 3 à 77 ans, ils n’avaient aux yeux de leur assassin qu’un seul tort, celui d’être musulmans. L’horreur absolue au nom de la haine de l’autre, dans un pays paisible qui ne connaît aucune tension communautaire par ailleurs.
Mais le fanatique a d’abord écrit un pamphlet. Il y explique qu’il a voyagé et qu’en France il a lu et entendu la fameuse théorie du remplacement, celle qui, à force de chiffres inconsistants, veut démontrer que l’Islam va extirper les racines judéo-chrétiennes de l’Occident et que c’est en réaction à cette perspective qu’il faut réagir et perpétrer son acte terroriste.
Lors d’un débat, affligeant, entre le comédien d’origine marocaine Yacine Belattar et Eric Zemmour, tenant de cette théorie et grand pourfendeur de l’Islam, il fut question de la responsabilité de cette théorie dans la tuerie. Les dénégations du pseudo-journaliste et vrai islamophobe ont été pathétiques.
« La passivité des intellectuels devant ces torrents de haine crassement ignorante, est désespérante »
En vérité, depuis Hutchington et son funeste choc des civilisations, la parole essentialiste, raciste, s’est libérée et ce, dans toutes les sphères, qu’elles soient occidentales ou arabo-musulmanes.
De l’autre côté, les phénomènes migratoires, largement dépendant des distorsions économiques et bientôt du réchauffement climatique sont assimilés à une invasion, qui serait pensée et planifiée pour islamiser l’Occident.
L’on se rappelle du tollé qu’avait soulevé la phrase de Jacques Chirac sur « les odeurs ». Aujourd’hui, des universitaires s’intéressent aux prénoms à consonance arabe et y voient « une insécurité culturelle ». L’échec de l’intégration, faute d’une vraie politique de mixité, est mis sur le compte d’une incapacité de l’Islam à se mouvoir dans « la civilisation ». L’ignorance s’affiche au nom de la science.
Dans la sphère arabo-musulmane, le tumulte du monde, les guerres impérialistes, les crimes d’Israël, sont utilisés pour accréditer la thèse selon laquelle les autres : les Juifs et les Chrétiens n’ont qu’un seul objectif, celui de détruire l’Islam et que donc c’est une guerre sans merci qui dure depuis quinze siècles.
Ces théories, baptisées pensées par des ignares que la télé et l’internet installent dans un rôle de doctes, ont une conséquence, le terrorisme.
Toutes les réponses sécuritaires ne réussiront pas à éradiquer le phénomène tant que ces pensées ne seront pas éradiquées, partout, avec la même détermination. La passivité des intellectuels devant ces torrents de haine crassement ignorante, est désespérante. C’est de ce côté-là qu’il faut appeler au sursaut.
La conflictualité installée par les essentialistes, les racistes est un gouffre sans fin, parce que l’on est toujours l’autre pour quelqu’un. Et il y aura toujours des fous pour aller à l’extrême dans la haine de l’autre, dès lors qu’il est désigné par les clercs.