Portrait

Un ingénieur et un manager, des associés complémentaires

L’un est un ingénieur créatif, l’autre un manager entreprenant. Rédouane Aguida et Omar Tahiri sont de ces cadres supérieurs qui se sont lancés dans l’entreprenariat avec succès, en se basant sur leur complémentarité. Par  Noréddine El Abbassi

Une association est comme un bon mariage. Tout est fixé par contrat, et les questions d’affinités sont fixées avant la signature. Et comme dans toute association, les affinités sont parfois subjectives, comme des valeurs morales tirées du piétisme de rigueur. Rédouane Aguida et Omar Tahiri sont de ces managers qui se sont rencontrés dans le monde du salariat, avant de décider de sauter le pas dans l’entreprenariat.
Rédouane, l’aîné, est né en 1977. Il voit le jour à Salé, près de sa famille maternelle, mais c’est à Casablanca que cet aîné des quatre enfants d’un fonctionnaire passe ses premières années. Sa jeunesse se partage entre les week-ends chez la famille, à Rabat ou Salé, et la semaine à Casablanca. “J’étais scolarisé dans le public. A l’époque, il était honteux d’étudier dans le privé”, explique-t-il avec l’assentiment de son associé.
La famille est alors portée sur la religion, et comme les loisirs étaient rares pour les enfants, il se concentre sur le sport. Il joue indifféremment au foot, au tennis et pratique le Karaté. Mais sa jeunesse est bercée par le traditionalisme de sa famille paternelle de théologiens. Du côté de sa mère, son grand père, lui, était procureur du Roi. Massif, et les traits burinés par la vie au grand air et le soleil pesant, Rédouane a des airs d’homme de terrain, plus habitué de la vie de campagne que des bureaux et éclairages artificiels.

Ingénieur créatif, cuisinier à ses heures perdues

Omar, lui, est né à Casablanca. Benjamin de deux enfants d’un père haut cadre à la Régie des Tabacs, c’est également dans la ville blanche qu’il grandit. Sa mère est une enseignante de mathématique reconvertie dans le fashion design de vêtements traditionnels marocains. Cette dernière tient cette passion de son propre père, importateur de tissus, reconverti dans le textile. Du côté paternel, ce sont des gens de la terre actifs dans la distribution agroalimentaire. C’est peut-être cette fascination pour sa mère qui développe son intérêt pour la mode et la photographie. Cette dernière passion le suivra jusque de nos jours. Pour l’école, Omar suit les cours de l’école “Bennis”, le groupe Scolaire d’Anfa et a pour loisirs le tennis. Plus tard, il se tourne vers le billard, lorsque la mode commence au Maroc. “J’étais un garçon rangé, mais assez fêtard, explique-t-il. Lorsqu’il obtient son bac en 2001, Omar doit rester au Maroc : “on me disait que j’étais trop jeune pour partir et qu’il me fallait attendre un peu. Au final, je ne suis jamais parti. Mais à la maison, j’aimais bricoler avec mon père. C’est tout naturellement que je me suis orienté vers les études d’ingénieur à Al Akhawayn”. Pendant cette période d’interne à Ifrane, il développe un autre talent enseigné par ses deux parents: la cuisine. “J’avais du mal avec la nourriture de cantine, où je n’ai jamais mangé. Je cuisinais tous les jours dans ma chambre”, explique-t-il dans un rire taquin. Et ce talent lui sera utile bien plus tard.

Economiste restaurateur

Rédouane fera ses premières expériences dans la restauration à Toulouse. Il a obtenu son bac scientifique en 1994 et enchaîne avec une licence en Sces éco de l’Université Hassan II en 1998. Il passe une équivalence à Toulouse une année après, et décide de commencer dans la vie professionnelle. “Mon premier poste a été plongeur, avant de devenir commis de cuisine, puis aide cuisiner et même de travailler en salle. J’ai appris les bases depuis le début avant de commencer à gérer deux laboratoires de productions pour un glacier de Toulouse”, révèle-t-il. Au bout d’une année, il allie les jobs d’étudiants aux études, qu’il poursuit à l’Université Toulouse I. Là, il décroche une maîtrise en économie industrielle et une autre en économie et gestion d’entreprise. “L’Université Marocaine a tout de même un bon niveau, puisque j’ai décroché mon équivalence dès la première année et que j’ai poursuivi sans aucun problème en France”, commente-t-il. L’assertion doit être vraie, puisqu’il termine ses études par un Master en Audit interne et contrôle de gestion. Lorsqu’il rentre au Maroc, il fait ses débuts à l’Omnium Nord Africain dans son domaine d’expertise, l’audit et le contrôle de risques pour la Cosumar en 2002. Rédouane prend rapidement du galon et est bombardé responsable central de contrôle de gestion pour quatre filiales pour la multinationale. Son entrée dans le conseil, il la fera au sein de la même compagnie, lorsqu’il sera affecté à Archos, la filiale dédiée à cette activité de l’ONA, où Rédouane pilote le projet de mise en place de la norme IFRS en 2008.

Collègues au travail, associés dans les affaires

Omar, lui, décroche son diplôme d’ingénieur en 2005. L’année suivante sera celle de son mariage. A ce moment, Omar travaille pour l’éditeur du logiciel éponyme SAP. Il restera dans ce même domaine, mais quitte SAP pour Capital Consulting en 2008. C’est là qu’il rencontre Rédouane qui rejoint l’entreprise en 2009. Ils se côtoient le temps du passage de Rédouane dans l’entreprise, une année, et explorent les possibilités de collaborations. Pendant ce passage, Rédouane enchaîne les missions au Maroc et au Sénégal avant de rejoindre Fertima. Nouveau croisement, Omar réalise une mission en système d’information pour ce même groupe avant d’être recruté comme chargé de mission auprès du DG. Nous sommes en 2012, lorsque Omar a une illumination: “je me suis rendu compte que j’avais pris le pli du consultant et que je ne pouvais pas vivre en bureau”, analyse Omar. Petit, un physique de “dad bod”, bon père de famille, il semble garder en tête le bien être des siens. Il reste dans l’entreprise 6 mois, et en 2013 commence chez Maimouna, avec l’ambition, plus que jamais, de se lancer dans les affaires. “Nous nous concertions et explorions les possibilités d’affaires. Rédouane a lancé un restaurant à Sidi Bernoussi, en 2011: Pause Tagine. Il fallait explorer cette piste, mais dans le même temps, il est rare qu’un restaurant survive à la mode. Une fois l’effet de nouveauté passé, rares sont ceux qui ont plus de 20 années d’existence”, explique Omar. Ils se lancent donc à corps perdu dans le concept Bistrot Burger, sans alcool, et avec un décor hipster et une carte entre le burger “gourmet” et la brasserie française. Le projet commence en 2013, mais c’est en 2014 que l’affaire ouvre ses portes. Aujourd’hui, leur projet est de lancer une chaîne à travers le monde, tout en gardant l’aspect artisanal. Ils n’ont peut-être pas le profil “hipster”, mais les idées business n’ont pas de critères.

 
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