Vente avec clause de réserve de propriété : une couverture contre les impayés
Un nouveau type de vente intègre le corpus juridique marocain sous l’appellation « vente avec clause de réserve de propriété », l’objectif recherché étant d’améliorer l’environnement des affaires en donnant aux entreprises un moyen de se couvrir contre les risques d’impayés générés par les opérations de vente.
Le Dahir formant Code des Obligations et des Contrats (DOC) vient de connaître sa plus grande refonte depuis son adoption en 2013. Parmi les changements opérés figure, en bonne place l’ajout d’un nouveau type de vente qui est venu enrichir ce qui est appelé dans le DOC les «espèces particulières de vente». En plus de la vente à réméré, de la vente sous condition suspensive, de la vente à livrer avec avance de prix et de la vente d’immeuble en l’état futur d’achèvement, notre droit civil comporte dorénavant une nouvelle « espèce » de vente appelée « vente avec clause de réserve de propriété ».
En quoi cette vente se distingue-t-elle de la vente de droit commun ? Sa grande particularité est de permettre au vendeur de retarder le transfert de la propriété du bien vendu jusqu’au paiement intégral du prix par l’acheteur. C’est une grande dérogation au principe consacré par le DOC et selon lequel la propriété du bien est transférée à l’acheteur dès la conclusion du contrat, peu importe que le vendeur soit payé ou non.
On retient donc facilement que la particularité de la vente avec clause de réserve de propriété réside dans la protection du vendeur contre les impayés. C’est ce qui explique que ce type de vente a été introduit dans le cadre de la batterie de mesures prises pour l’amélioration de l’environnement des affaires. L’objectif est d’aider les entreprises à se prémunir contre les risques de non-paiement et ce, en évitant le transfert de la propriété dès la conclusion du contrat de vente.
Ainsi, il est dorénavant permis à toute entreprise qui vend un bien d’insérer une clause prévoyant que le transfert de la propriété ne sera fait qu’à la date de paiement complet du prix par l’acheteur. La clause de réserve de propriété doit être écrite et insérer tout document établi par le vendeur : contrat, bon de livraison, bon de commande, facture etc. Mais quel que soit le document utilisé, la clause de réserve de propriété doit apparaître d’une manière claire pour éviter toute contestation de la part de l’acheteur. Et pour être opposable aux tiers, elle doit être inscrite au Registre national Electronique des Sûretés mobilières (RNESM). En imposant cette formalité d’inscription, la loi marocaine assimile la clause de réserve de propriété à une garantie mobilière, ce qui n’est pas sans soulever quelques interrogations quant à sa nature juridique.
Lorsque le prix du bien vendu n’est pas payé en intégralité à la date d’échéance, le vendeur a le droit de récupérer le bien dans les conditions convenues entre les parties. A défaut d’accord, le vendeur peut faire ordonner par le président du tribunal, en sa qualité de juge des référés, la restitution du bien.
La clause de réserve présente, en outre, un grand intérêt pour le vendeur lorsque l’acheteur fait l’objet d’une procédure collective (procédure de sauvegarde, redressement judiciaire, liquidation judiciaire). Dans un tel cas, le vendeur exerce son droit de revendication en récupérant ses biens non encore payés par l’acheteur, ce qui constitue un grand avantage par rapport aux autres créanciers qu’ils soient chirographaires ou privilégiés.