Portrait

Entrepreneur du BTP dans la franchise

Adil Kadiri Yamani, franchisé Adolfo Dominguez

Ce quarantenaire dans la force de l’âge, a déjà un CV d’entrepreneur bien rempli. Comme la clé du succès est dans la diversification, il a ouvert deux franchises à Rabat, et compte parmi les entreprises de travaux publics de référence sur la place.
Par Noréddine El Abbassi

Parfois, pas toujours, on peut deviner ce que l’on sera, dès le plus jeune âge. Adil Kadiri Yamani a été de ces enfants espiègles et débrouillards qui, néanmoins dès l’enfance, semblaient destinés à se tailler une place de choix dans le monde des affaires. Son parcours aura certes,  été fait de hasard, mais qu’il a su tourner à son avantage.
Adil Kadiri Yamani est né en 1971 dans la petite ville côtière du pays, Larache. Ses parents exercent tous les deux dans la fonction publique. La famille compte six enfants, dont Adil est le troisième. Les plus âgés parmi nous, ont encore en mémoire, cette cité qui avait gardé l’empreinte  espagnole, dans ce qu’elle a de plus typique. Larache attire à l’époque nombre d’artistes, venus chercher la quiétude et la sérénité, propices à l’éclosion et au développement de leurs talents ou ce qu’ils pensent être leur destin artistique. C’est qu’à cette période et durant une décennie, une activité culturelle intense est très présente dans la cité. La “Semaine de Larache” est un évènement durant lequel la ville prend des airs de Carnaval Vénitien, avec la musique qui prend possession des rues, des déguisements que les jeunes et moins jeunes rivalisent à varier et bien d’autres  activités culturelles, plus traditionnelles. On situe la fin d’une telle période à l’année 1979, qui marquera la fin des festivals, et un tournant qui s’étendrait à tout le Royaume.
Une des particularités de Larache et qui rappelle à Adil son enfance, est la pratique généralisée “d’un sport bien particulier”, répandu tout autour de la Méditerranée, à savoir, la pétanque. Les “notables” quant à eux, se distinguent et se retrouvent les week-ends pour s’adonner à la pêche, plus précisément celle d’un poisson “noble”, le thon. En somme, c’était une époque festive, lorsque la ville avait encore une âme, avant la crise. Depuis, le chômage est passé par là et en même temps, les stupéfiants ont fait leur apparition.
Néanmoins, Adil grandit dans un environnement calme, au sein d’un foyer de la classe moyenne qui, dans le temps avait une signification et des conditions économiques acceptables. “Mon père était très sévère, et ma mère nous couvait à outrance. Pour elle, la vie familiale était un cocon, dont nous ne pouvions nous soustraire. Sans oublier qu’elle nous suivait de près dans nos études”, se remémore-t-il, dans des soupirs et des signes de tête qui appuient la rigueur de foyer. Mais déjà, Adil est un garçon débrouillard. Du reste, la famille ne se cantonne pas dans sa ville, mais s’ouvre sur son environnement proche. Les déplacements à Fnideq et Medieq, sont fréquents et l’attrait n’est pas seulement touristique. En effet, ces deux places sont d’ores et déjà, des lieux d’échange et de commerce de produits venus d’Espagne et de Sebta. Adil, fait ses premières armes. Il achète des produits électroniques et des consommables divers, qu’il commercialise d’abord auprès de son entourage et par là même, se fait son argent de poche. Pour commencer seulement et ne s’arrête pas à ce stade. Etait-il plus riche que son père? “En épargne, sûrement, puisque mon père devait entretenir une famille de six enfants. Mais  je pouvais inviter régulièrement mes frères et soeurs, pour des petites sorties. Il est évident que ce n’était pas avec les 5 dirhams hebdomadaires que me donnait mon père, que je pouvais me permettre des loisirs et encore moins d’en faire profiter mes proches”, explique-t-il, avec force modestie.

Un potentiel de businessman

Arrive 1986, quand la famille doit déménager à Kénitra, les parents y ayant été mutés. La scolarité de Adil se poursuit dans le système public de la ville. Les dimensions de cette nouvelle destination et l’âge aidant, il peut de temps en temps prendre certaines libertés et échapper à la vigilance de sa mère. Il peut même se payer une moto, et être encore plus libre pour sortir, pour se déplacer. Mais néanmoins, le carcan familial est toujours là, avec une touche assez conservatrice, même si les parents se détendent avec le temps, et suivant l’évolution de l’époque. Les vacances d’été sont l’occasion pour la famille de changer de lieux et d’aller vers les montagnes du Moyen Atlas, à partir de Fès comme point d’appui. Adil se rappelle ces moments agréables et insouciants, où l’on goûte au plaisir d’une nature encore vierge et bienfaisante. Le souvenir agréable des séjours à Sefrou, Immouzer ou Azrou est encore vivace dans sa mémoire. Adil développe ses activités extra-scolaires et s’ouvre vers l’extérieur. Il collabore périodiquement au quotidien “l’opinion”, plus précisément au supplément “jeunes” qui publie ses “papiers”. “J’envoyais des poèmes et des réflexions sur la base des livres de l’école. Mais pour ma mère, il n’était pas question de perdre son temps avec les filles”, relate-t-il, dans un rire franc. Même s’il est scolarisé dans un lycée mixte, les moeurs de l’époque sont encore rigides. La barrière de séparation entre les sexes dans la société, est également présente dans le système scolaire, malgré tout. Mais cela n’empêche pas l’élève Adil de vivre sa vie et d’être plutôt  exubérant, et en même temps de passer ses classes sans problèmes. Peut être que la vigilance familiale y est tout de même pour quelque chose. Cette période bénie  et tellement agréable, prend fin en 1988 quand Adil décroche son bac Sciences expérimentales.
Il “descend” alors à Rabat poursuivre ses études. Il opte pour les sciences économiques   et concrétisera le cycle en 1991, par un diplôme en économétrie. Mais déjà, il sait qu’il fera “des affaires”, et se prépare à la vie professionnelle, “s’essaie” au commerce. Il commence par aménager des locaux commerciaux et en fait, par “bricoler”, comme on dit dans le langage de l’informel.  Puis au détour d’une rencontre, il devient sous-traitant pour le Centre 2000. Ce premier “mall” à l’échelle africaine est alors un fleuron de la vente au détail. Il monte en grade et prend la responsabilité pour les marques Sole, Ambre et Impératif, commercialisées dans le Centre. Lorsque l’affaire commence à battre de l’aile, Adil décide de se réorienter et de travailler pleinement à son compte.

Du BTP à la franchise

Nous sommes en 1993, après un temps de remise en question et de réflexion, Adil se décide à reprendre le collet de ses études au Collège des Arts et du Patrimoine. Peut être que dans cette décision, l’activité de sa mère dans le domaine, a joué d’une manière ou d’une autre. En 1995, Adil est fraîchement diplômé en aménagement urbanistique et immobilier d’entreprise. Il fait ses premières armes dans l’immobilier, timidement, construisant  des petits immeubles, dont il revend les appartements séparément. Mais déjà, il voit les choses en grand: monter sa propre entreprise de BTP et soumissionner à des marchés publics. Ce sera fait en 1999: “J’ai commencé avec un capital de 100 000 dirhams, et j’ai soumissionné à 24 marchés avant de remporter mon premier contrat, alors que j’étais au bord de la faillite”, expose-t-il.
Adil se consacre entièrement à cette nouvelle activité, surveillant ses chantiers les uns après les autres et de ville en ville. Il participe et visite, sans relâche, différentes foires  consacrées au BTP. C’est tout à fait par hasard quand, en 2006 et depuis la fenêtre de sa chambre d’hôtel, une annonce pour la “Foire de la franchise”, attire son attention. Dès lors, c’est le déclic. Depuis, il multiplie les voyages et les contacts, décidé à “aider le destin”. Il repère une marque espagnole de prêt-à-porter de luxe: Adolfo Dominguez. Il obtient la master franchise de la chaîne en 2013, après deux années de négociations. Dans la foulée, il décroche la franchise de la bijouterie Art in Silver. Récemment, les deux enseignes se sont installées au Maroc. Cette activité parallèle est en fait une affaire de famille. En effet, sa femme Sophia Lahlou, conçoit également des modèles de bijoux pour la marque. Dans le fond, tout partenariat d’affaires, serait-il comme un bon mariage: des intérêts communs dans une relation gagnant gagnant…

 
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