Just Fontaine fait entrer le Maroc au musée mondial du football
Un marrakchi dans la légende
Il est comme ça, des coïncidences que la vie nous offre pour que l’Histoire se fasse. On va les présenter comme un postulat de départ : Maroc, Mexique, Coupe du Monde. Ces trois entités se sont retrouvées en une seule cérémonie à Mexico le mois dernier lorsque a eu lieu l’ouverture du Salon de la FAMA (gloire en espagnol), qui est le premier lieu de la planète voué à rendre hommage aux personnalités les plus émérites de l’histoire du football.
Just Fontaine le Marrakchi qui, parti en France après des débuts tonitruants dans le football marocain, allait devenir le recordman des buteurs, avec la sélection française en Coupe du Monde. Ce sont les treize buts marqués en une seule édition (1958), total jamais égalé qui ont valu à « Justo » le fils du quartier marrakchi de Guéliz, d’être distingué auprès des plus grands footballeurs.
Qu’est le Salon de la FAMA ?
Pour mieux appréhender l’importance de l’évènement et de l’avènement, précisons à nos lecteurs ce qu’est le Salon de la Fama tel que l’hebdo France Football l’a présenté dans une de ses éditions.
« …Inauguré en juillet 2011 par Sepp Blatter, qui en est le président honoraire, le Salon de la Fama est parrainé par la FIFA. Ce lieu de mémoire prend la forme d’un immense ballon de 40 mètres de hauteur, visible au loin quand on arrive depuis Mexico, la mégalopole distante de moins de 100 kilomètres. Cet édifice sphérique abrite un parcours en colimaçon, qui retrace l’histoire du football depuis la création de la FA (Football Association, la Fédération Anglaise de football) au sein de la taverne Freemason’s jusqu’à la dernière finale de Ligue des champions. Dans les vitrines, photos, ballons ou maillots d’époque documentent les hauts faits réalisés par des hommes en crampons. Depuis quelques jours, un cliché de Just Fontaine, issu de sa collection personnelle, est venu enrichir le panneau réservé à la Coupe du monde 1958. « Il existait des Hall of Fame du basket, du football américain, et du base-ball, introduit Antonio Moreno, directeur exécutif du Salon de la Fama, mais le sport le plus populaire au monde n’en disposait pas. J’ai voulu réparer cette anomalie.
Si l’idée trottait depuis une bonne dizaine d’années dans la tête de ce journaliste aux huit phases finales, il a fallu attendre l’appui de Jésus Martinez, président du club de football de Pachuca (Première Division) pour qu’elle se concrétise enfin. « Pachuca paie tout, indique Moreno, Jésus Martinez est un visionnaire, qui a toujours innové, et l’idée du Salon de la Fama l’a séduit». L’élément le plus remarquable de l’édifice est sans doute abrité en son deuxième étage. D’immenses écrans interactifs permettent aux visiteurs, plus de 100.000 depuis son ouverture, de visionner des vidéos et de manipuler des photos des légendes qui ont fait leur entrée au sein de ce panthéon du football. »
Que Fontaine ait eu l’honneur de figurer dans ce panthéon est une fierté aussi pour le Maroc, pays dont Fontaine n’a jamais oublié les racines. Comme Marcel Cerdan en son temps, l’Histoire de Fontaine est indissociable du Maroc.
En 1979, il était venu, appelé par Feu SM le roi Hassan II, au chevet d’une équipe nationale traumatisée par la défaite (1-5) face à l’Algérie. Quand il partit en 1980, le onze national avait retrouvé son rang (3ème de la CAN 1980 de Lagos) et l’avenir des Lions de l’Atlas allait s’éclairer en 84 (Los Angeles) et en 1986 (Coupe du Monde au Mexique).
Fontaine, invité d’honneur à Mexico n’a pas pu oublier qu’en 1970 il avait suivi, en spectateur privilégié les premiers pas du Maroc en Coupe du Monde. C’était dans la ville de Léon et face à l’Allemagne pour un magnifique match qui a marqué l’histoire du foot marocain. Contemporain des Hassan Akesbi, Zhar, Bettache, Bel mahjoub et tous les autres grands, Fontaine n’oubliait pas non plus les plus anciens. Et c’est ainsi qu’en 2001, lors d’un séjour à Marrakech il avait demandé à aller visiter « Chinois » rugueux défenseur du S.A.M et qui, dans les années 40-50 aurait pu faire un très gros transfert vers le foot pro français, mais très attaché à sa mère, Chinois n’a jamais voulu quitter le Maroc.
C’est accompagné de Mahjoub Faouzi, historien du football attaché à la CAF que Fontaine lui rendait visite ce jour de 2001 dans sa maison de Douar Laaskar où Chinois vivait en homme tranquille, bien qu’il soit devenu aveugle.
La noukta marrakchia
Au Mexique où siège désormais le Salon de la Fama, on connait très bien le Maroc et ses footballeurs. En 70, Allal, Bamous, Houmane, Maaroufi y avaient fait découvrir le foot africain au monde entier.
16 ans plus tard en 1986, c’était à Guadalajara que les Zaki, Timoumi, Dolmy et Byaz écrivaient l’une de nos belles épopées. Epopées toutes suivies par Fontaine, qui, avant la Coupe du Monde 86, avait fait inviter sur Antenne 2 (l’ancêtre de l’actuelle France 2) Larbi Ben Barek lors d’une émission spéciale Football réalisée à Paris. On n’oubliera pas, et Driss Benhima également, que Fontaine participa avec toute son énergie et son talent à la campagne de promotion de la candidature du Maroc pour la Coupe du Monde 2006. Ses interventions, ses conférences de presse ont fait le régal de tous les observateurs.
Car, le bonhomme a de l’humour et du bagout.
Voici ce qu’il a dit au Mexique devant une salle conquise « Cela fait cinquante et un ans que je suis marié mais comme ma femme a peur de l’avion, j’ai amené un remplaçant Dominique Colona, car il est du même signe zodiacal que ma femme : Vierge. Et j’espère le rester après le voyage ».
Et encore cette sortie : « Je suis marqué par le chiffre 13, outre mon record de 13 buts, ma maison se situe au numéro 13, cela fait 13 Coupes du Monde que mon record tient, et cette cérémonie se tient un 13 novembre ». Enfin interrogé sur son secret de buteur Just Fontaine a répondu : « le secret pour marquer des buts ? Il faut tirer au moment « juste ».
Si vous riez de ces facéties, c’est que Fontaine a atteint son but, lui qui a passé son enfance à Marrakech dans la ville de la bonne humeur et de la noukta.