Financement

L’agent des sûretés intègre le paysage financier marocain

Un nouvel acteur fait sa première entrée dans le secteur bancaire. Il s’agit de l’agent des sûretés qui est appelé à jouer un rôle important dans la gestion et la sécurisation des garanties mobilières couvrant les lignes de crédit. Il contribuera ainsi à combler une lacune qui ne favorisait pas la mise en place des financements consortiaux.

Parmi les apports du projet de loi sur les sûretés (garanties) mobilières qui vient d’être approuvé par le gouvernement, figure la création de l’«agent des sûretés» qui intègre pour la première fois le système financier marocain. Concrètement, l’agent des sûretés a pour fonction de prendre en charge la gestion des garanties mobilières retenues en couverture des crédits consortiaux, pendant toute leur durée de vie, c’est-à-dire de leur inscription jusqu’à leur extinction.

L’arrivée de l’agent des sûretés mobilières va contribuer dans une certaine mesure à l’assouplissement des financements consortiaux. Jusqu’à présent, les garanties mobilières étaient prises en charge soit par le chef de file des banques participant au consortium, soit par chaque banque participante agissant dans la limite de sa participation à la ligne de crédit. Mais dans les deux cas, le mécanisme ne favorisait pas la mise en place et la gestion des crédits consortiaux.

Il faut souligner que l’approche adoptée par le gouvernement, à travers le ministère des Finances, est très timide et n’apporte pas une vraie solution à la problématique de garanties couvrant les crédits consortiaux. Le fait de limiter l’intervention de l’agent des sûretés aux seules garanties réelles mobilières ne permet pas à ce dernier d’intervenir sur tous les types de garanties. Sous d’autres cieux, le périmètre de son intervention est étendu à toutes les garanties réelles et personnelles.

Un texte limité

Le régime d’agent des sûretés est d’origine anglo-saxonne (security trustee) et n’a été introduit en droit français qu’en 2017. Le projet de loi marocain s’inspire profondément de la loi française de 2007 qui n’a pas survécu plus d’une dizaine d’années pour être complètement refondue en 2017, à la lumière des imperfections relevées dans la pratique. C’est pourquoi le texte marocain risque fort de ne pas résister longtemps compte tenu de ses limites.

L’agent des sûretés est défini par le projet de loi marocain comme étant toute personne (physique ou morale) agissant au nom et pour le compte des créanciers, en qualité de mandataire desdits créanciers, pour constituer, inscrire, gérer ou réaliser les garanties constituées à leur profit. Aucune condition de compétence n’est exigée pour l’exercice de cette activité, ce qui risque d’ouvrir la porte à des personnes ne disposant pas de qualifications requises dans le domaine des garanties. Son mandat est révocable dans le cadre des conditions prévues par l’acte de mandat, par décision unanime des mandants (créanciers) ou par décision du juge en cas de comportement grave de l’une des parties. Le mandat prend fin par l’arrivée de son terme, la démission de l’agent et l’extinction de la créance garantie.

Ce qui mérite d’être retenu à ce niveau est qu’à la différence d’un certain nombre de législations étrangères où l’agent des sûretés est un agent fiduciaire, le texte marocain lui donne la qualité de simple mandataire. Les conséquences sont très importantes.

Dans la nouvelle loi française de 2017, l’agent des sûretés a la qualité d’agent fiduciaire, ce qui lui permet d’être titulaire direct des garanties constituées au bénéfice des créanciers. Les garanties sont transférées dans un patrimoine d’affectation distinct du patrimoine de l’agent des sûretés.

Dans le cadre de son mandat, l’agent des sûretés constitue, inscrit, gère et réalise les garanties. De même, il représente les créanciers à l’égard des tiers et peut ester en justice pour défendre les intérêts des créanciers, y compris pour déclarer leurs créances au syndic en cas d’ouverture d’une procédure de traitement des difficultés de l’entreprise. A noter, que les créanciers ne peuvent pas exercer partie ou totalité de la mission qu’ils ont confiée à l’agent des sûretés.

Lorsque l’agent des sûretés procède à la réalisation d’une sûreté, les fonds récupérés sont portés au crédit d’un compte d’affectation spéciale ouvert à son nom auprès d’un établissement bancaire. Ledit compte ne peut pas faire l’objet de procédures d’exécution au profit de tierces personnes. Les sommes y figurant sont exclusivement réservées aux créanciers représentés par l’agent des sûretés, ce qui sécurise les intérêts de ces derniers…

 
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